HISTOIRE DES PLAQUES DE COCHER

 

Définition

Le terme Plaque de cocher est un néologisme. Ce terme est né vers 2000 sur internet. Il désigne les plaques et par extension les poteaux avec plaques, directionnels, apposés au bord des voies de communication à partir de 1835, date de la circulaire génératrice de cette signalisation.

Jusqu’en 1845 les plaques en fonte peinte, les plaques en bois peints, les poteaux en pierre avec lettres gravées ou peintes, les enduits de mortier avec lettres peintes, les plaques en tôle avec lettres peintes, étaient les principaux matériaux utilisés.
A partir de 1845, les plaques en fonte avec lettres en relief font leur apparition, à partir de 1866 les plaques en zinc laminé. Sans oublier les plaques en lave émaillée.

Les implantations selon les matériaux ne suivent aucune règle chronologique, on trouve l’implantation de plaques en fonte précédant des plaques de bois peints, de même on peut implanter des plaques en tôle émaillée avant les plaques en fonte: les  critères de choix étant avant tout économiques et répondaient à un objectif commun: perfectionner le système de communication par la mise en place d’une signalétique directionnelle.

 

 

Terminologie

A l’origine ces plaques étaient désignées sous les termes de tableaux indicateurs (1835), de poteaux indicateurs (1833). On trouve également dans les archives départementales et dans les Annales des Ponts et Chaussée le terme de plaques indicatricesIl est communément admis que les tableaux indicateurs  étaient situés à une hauteur comprise entre 2m50 et 3 mètres de façon a êtres vus par les cochers. A la vérité, il n’y a jamais eu de hauteur spécifiée pour leur mise en place. Cette hauteur dépendait de la façade du bâtiment. Par contre, les Ponts et Chaussée, dés 1835, proposaient la construction de poteaux indicateurs dont la hauteur hors sol était effectivement de 2M50.

J’ai en outre utilisé dans cet article les termes officiels – de l’époque – pour désigner les pyramidions, ou pyramides: le terme officiel était pilastre, de même pour les plaques de situation en Sarthe ou Drôme…. le terme officiel étant:  plaque de distances légales

 

Les panneaux indicateurs avant 1833

L’évolution de la signalétique terrestre est directement liée à l’extension du réseau routier, au développement du commerce et bien sur  à l’évolution des transports.

 

Dés l’époque romaine, les bornes dites milliaires balisaient les voies de communication. Il ne s’agissait pas tant d’indiquer les directions que d’affirmer la représentation du pouvoir en charge de l’entretien des routes. 

Les routes de la poste à cheval sont crées dés le XVIème siècle sous l’égide de Sully; ce dernier, pour qui fut créé la charge de Grand Voyer, « était pénétré de l’indispensable nécessité d’une circulation facile dans une contrée aussi fertile que la France » (Recueil Polytechnique des Ponts et Chaussées) . Furent donc érigées sur ces routes postales des poteaux indicateurs; d’une taille de 2m20 y étaient indiquées les distances entre relais et les durées théoriques de parcours. Leur utilité, outre l’apport directionnel évident, était le calcul du coût de transport. 

L’ordonnance du 13 août 1669 ordonne en ces termes la mise en place d’indications dans les forêts:

ORDONNONS que dans les angles, ou coins des places croisées triviaires & biviaires qui se rencontrent és (les) grandes routes & chemins royaux des forests, nos Officiers des Maistrises feront incessamment planter des croix, poteaux ou pyramides à nos frais, és (dans les) bois qui nous appartiennent, & pour les autres aux frais des Villes plus voisines & interessées, avec inscriptions & marques apparentes du lieu où chacun conduit, sans qu’il soit permis à aucunes personnes de rompre, emporter, lacerer ou biffer telles croix, poteaux, inscriptions & marques, à peine de trois cens livres d’amende, & de punition exemplaire.

C’est sous l’impulsion de Colbert que fut rédigée cette ordonnance dite: « Sur le fait des Eaux et Forêts « , sa finalité étant  de développer les activités industrielles en général, celles  dépendantes de l’exploitation forestière en particulier: verrerie, briqueterie, construction navale, sans oublier les salines et les forges. La mise en place de panneaux indicateurs en forêt permettait d’espérer une exploitation rationnelle, sous l’égide du roi. 

 

La circulaire du 5 novembre 1833

La situation des routes en France ne cesse de s’améliorer, certes, mais ne peut faire face au développement exponentiel du commerce. En 1836, sur 34000 kms de routes Royales ouvertes, prés de 10000 étaient soit a réparer, soit en état dit de lacune (pour être clair, impraticables).

Deux facteurs principaux ont contribué à cet état des lieux:

 L’évolution à la hausse du poids des transports, les revêtements en pierres n’étant pas adaptés, (on parle même de l’énormité des poids qui pèsent sur nos routes – Becquey Conseiller d’Etat Directeur Général des Ponts et Chaussée et des Mines 1er juin 1824).

 Le système d’exploitation, avant 1811, largement basé pour la matière première sur les entreprises privées; un système difficilement contrôlable, des marchés générant trop souvent la fraude.

Un extrait du rapport au Roi établi par Becquey: « La manière d’employer les matériaux,  et le choix des moments ou il faut les employer sont les premières conditions non seulement d’un bon entretien mais surtout d’un entretien à peu de frais et ces conditions se trouvent en opposition directe avec la cupidité d’un entrepreneur dont le bénéfice est proportionnel à la quantité des fournitures. »

 

Ce n’est donc pas un hasard  si cette circulaire apparaît justement cette année là. Depuis quelques années, les responsables des Ponts-et-Chaussée font des navettes entre l’Angleterre et la France. Ils étudient, sans pour autant l’adopter, un procédé de revêtement, avec fondations, développé par un certain Mac-Adam. (Administration Générale des Ponts et Chaussée et des Mines – Tableau des Routes Royales 1824 ) 

Or en Angleterre, depuis un cinquantaine d’années sont implantés les fameux Fingerpost sur les routes. Ces panneaux, directionnels, remontent  pour certain avant la révolution française. (Highway Act 1766)

Ce n’est pas un hasard non plus si la circulaire de 1833 a été rédigée par Alexis LEGRAND, a l’époque Conseiller d’Etat chargé de l’Administration des Ponts et Chaussée et des Mines (depuis 1828). Député de la Manche depuis 1832 (Arrondissement de Mortain) il prend ses fonctions alors que les échanges avec l’Angleterre culminent: études sur les routes, sur les ponts, sur les fonderies. Nous sommes en pleine révolution industrielle et l’Angleterre en est le fer de lance.

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Cette circulaire est donc adressée à tous les préfets, à charge pour eux, via l’ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussée de leur département, de transmettre le résultat de l’étude qui devra donc établir:

Le mode de construction (le choix du matériau)

 Les dépenses a prévoir

Les lieux d’implantations.

Il ne s’agit ni plus ni moins que d’une étude de marché portant uniquement sur les poteaux indicateurs.

 

Alexis LEGRAND

1791 – 1848

L’éloge qui lui fut consacrée et retranscrites dans les Annales en 1848 fait ressortir la part importante qu’il prit  au développement des voies de communications de toute nature, voies royales, stratégiques, canaux, rivières navigables, ports de commerce et chemins de fer…

Il est en effet davantage connu pour avoir lancé les bases du réseau en étoile des chemins de fer français que pour la mise en place des poteaux indicaateurs. Déjà, en 1842, il propose un compromis entre le libéralisme à outrance et recommande un partage des tâches: les collectivités territoriales prendront en charge les expropriations, l’Etat les terrassements, les ouvrages d’art et les gares. le secteur privé posera le ballast et les rails, fournira le matériel roulant, assurera l’exploitation et l’entretien. 170 ans plus tard, nous sommes toujours confrontés à ce dilemme de répartition entre secteur privé et secteur public pour les infracstructures. 

C’est en ses termes que parlait de lui Villemain:

« (…) Aussi, durant une influence administrative de plus de vingt ans, son modique patrimoine ne s’augmenta pas dans la plus légère proportion…. Il ne laisse à ses enfants en son nom que ce qu’il avait lui-même reçu en héritage, une somme de 60.000 fr. Quant à la fortune de sa femme et de ses enfants, bien plus attentif à la conserver irréprochable qu’à l’accroître, il évita soigneusement d’en rien placer sur aucune des entreprises formées en France et dont il aurait pu seconder ou seulement pressentir le succès. »

D’aucuns décideurs d’aujourd’hui pourraient s’inspirer de cette conduite.

L’entretien des routes

Avant la révolution,cet entretien s’effectuait par la corvée: deux fois l’an, au printemps et à l’automne, les habitants voisins de la route, jusqu’à une certaine distance, étaient requis d’amener et de répandre des matériaux sur la surface de la chaussée. 

L’impôt de la corvée fut aboli en 1776 mais rétabli peu de temps aprés et définitivement abrogé en 1786.

Des fonds royaux, des subventions provinciales, des prestations en nature, pourvurent insuffisamment, au maintien de la viabilité. La révolution, faisant table rase de tous les décrets, laissa les routes dans un état déplorable. 

En 1797, le gouvernement établit des barrières sur les routes et crée la taxe d’entretien. Cette dernière vécut jusqu’en 1806, période durant laquelle elle ne cessa d’exciter les plaintes et les réclamations.

Jusqu’en 1811, l’entretien des routes en empierrements faisait l’objet de marchés portant sur les matériaux -fourniture et emplois- et portant sur des durées plus ou moins longues. 

Le décret du 16 décembre 1811 crée la fonction de cantonnier-adjudicataire. Ils ont en charge l’emploi des matériaux qui leur sont livrés: deux types d’adjuducations incompatibles. Aussi sont-ils remplacés dés 1816 par des cantonniers sédentaires ou stationnaires.

(Observations préliminaires, Routes Royales 1824  – BECQUEY)

 

La circulaire de 1835, routes Royales et Départementales

Si la circulaire de 1833 est une étude de marché, celle du 15 avril 1835 en est le résultat et sa concrétisation sur le terrain. 

Le Conseil Général des Ponts-et-Chaussées, 1ère section (créée en 1832 et chargée des routes et des ponts ainsi que de la voirie) s’est réuni afin de statuer sur le travail d’une commission ad-hoc. Cette dernière, composée d’inspecteurs divisionnaires, a présenté le résultat des propositions fournies par les ingénieurs (en chef)  des départements. 

 Apparaît pour la première fois la notion de tableaux indicateur. 

Trois points sont abordés: emplacements, financement et matériaux de construction.

 Lorsque les intersections des routes Royales et / ou Départementales seront en dehors des lieux habités, on y placera des poteaux indicateurs. Lorsque les intersections se situeront dans les lieux habités, les tableaux indicateurs se substitueront aux poteaux. (On notera qu’il n’est fait nullement mention d’une hauteur de fixation quelconque pour ces tableaux).

 Poteaux et tableaux seront financés et entretenus sur les fonds prévus à l’entretien des Routes Royales. En d’autres termes, le coût de cette signalétique sera supporté par l’Etat. Néanmoins, il est recommandé aux Conseils Généraux d’étendre la mesure aux croisement des routes Départementales entre elles: si cette mesure est laissée à la discrétion des départements ce n’est pas anodin; en effet dans ce cas le financement ne pourrait se faire que sur les fonds du département concerné.

 Les matériaux utilisés seront pour les poteaux: le bois, la pierre ou la fonte. Les tableaux seront peints sur les murs ou bien constitués d’un enduit de mortier. Dans tous les cas, la couleur choisie sera le fond bleu de ciel foncé, les lettres en blanc. 

 

Dés 1835, certains départements mettront en place une signalétique conforme aux recommandations de cette circulaire; c’est par exemple le cas du département du Rhône qui fera le choix de poser aux croisements des routes départementales (bien que non obligatoire) des poteaux en pierre en dehors des bourgs, et, à l’entrée et à la sortie des communes, quelque soient leur importance, des tableaux peints sur une muraille (sic). Dans les Vosges, des délibérations communales à MoyenMoutier font état de l’achat de poteaux indicateurs dés 1834. Dans le Calvados, en 1835, le Conseil Départemental demande au Préfet d’établir une liste des intersections des Routes Départementales entre elles afin d’y implanter des poteaux.

Les ingénieurs des Ponts préconisaient l’utilisation de deux modèles de poteaux indicateur, l’un en bois, l’autre en fonte de fer. Les lettres étaient peintes, souvent à la peinture à l’huile. (les caractères en relief n’existaient pas encore). Leur hauteur hors-sol était de 2m70.

Est également préconisé, outre le tableau indicateur d’un format 30 X 60 cm, le pilastre, en pierre, et qui se différencie du poteau par sa forme carrée. 

Pourtant les départements n’ont pas tous mis en oeuvre immédiatement le contenu de cette circulaire. Si le coût des poteaux indicateurs des routes royales devaient être pris sur les fonds destinés à leur entretien, ceux-ci étaient versés aux Conseils Généraux, à charge pour eux d’en faire la meilleure utilisation. Or de nombreux départements se plaignaient de la faiblesse des attributions. Tributaires de leur dépendance financière au Trésor la mise en place de cette signalétique  dura plusieurs décennies. 

Pour les mêmes motifs financiers, l’extension aux routes départementales, cette fois directement à la charge des départements s’éternisa.

 

1846: Bouilliant invente la plaque avec lettres en relief

C’est en effet le 8 aôut 1846 que Charles Henri Bouilliant dépose un brevet à la Préfecture de la Seine: il avait créé ce qu’il appelait laconiquement un « Genre de plaques d’inscription en relief« .
Il s’agissait effectivement de lettres en relief coulées (fond et lettres d’un seul jet) en fonte de fer, zinc, cuivre ou tout autre métal fusible. Jusqu’en 1861, tous les panneaux indicateurs  et les poteaux indicateurs  avec les lettres en relief que nous connaissons sortirent de sa fonderie: son brevet lui assurait ce monopole pendant 15 ANS !

La plaque de cocher, version internet, était née

Il est difficile d’évaluer le nombre de plaques et poteaux indicateurs fabriqués par cette entreprise familiale. Mais il s’évertua à faire connaitre ses réalisations à l’ensemble des Conseils Départementaux en France, mais aussi en Algérie (à l’époque française). 

Vous trouverez en suivant ce lien l’article qui est consacré à cette fonderie:

Conjointement aux démarches prospectives engagées vers les Conseils Départementaux par Bouilliant, il utilisa les accointances qu’il avait au sein des Ponts-et-Chaussées, plus particulièrement les relations qu’il entretenait avec un ingénieur du nom de Jules de Cambaceres. Domiciliés tous deux dans le quartier de Belleville, ils avaient un point commun, les dépôt de brevet, l’un pour les plaques, l’autre dans le domaine de la chimie. 

Cette même année 1846, Jules Cambacérès rédigea un article dans l’organe officiel des Ponts, les Annales des Chemins Vicinaux. Il y traite sur le fond des « Poteaux, et tableaux Indicateurs des chemins, et des bornes kilométriques« . Cette note succède à celle de l’ingénieur en chef de la Sarthe, Dumas, traitant des teintes à adopter pour la signalisation directionnelle. Ces articles sont reproduits dans le catalogue de la fonderie Bouilliant édité en 1849. Ils sont le prolongement de la loi de 1836 dite de Thiers-Monthalivet qui instaure les Chemins Vicinaux classés en Chemins de Grande Communication et Chemins d’intérêt Commun. Il faut y voir un souci d’harmonisation et d’uniformité tant dans la conception de la signalétique que dans les teintes. 

Sans vouloir reprendre par le détail le contenu de ces notes (que vous trouvez intégralement plus bas) on peut néanmoins noter certains points:

 Il est admis que les tableaux indicateurs peuvent être en fonte avec lettres en relief, Cette solution étant en tête des possibilités (avant l’enduit de mortier). Le nom de Bouilliant n’est certes pas cité mais étant le seul sur le marché à proposer de tels tableaux… 

 Les remarques relatives au rapport longévité / prix, comme celles relatives au rapport entretien / prix, tant pour les poteaux que pour les tableaux, orientent incontestablement vers le choix de la fonte avec lettres en relief. Et ceci au détriment du bois dont le coût est certes moins élevé mais dont la longévité, comme l’entretien, sont plus onéreux sur le long terme.

 Le souci lié à la reclassification des voies de communication, devant entraîner une modification du contenu des tableaux ou des plaques de poteaux, est largement évoqué. Les solutions de mises à jour vont de l’utilisation de feuilles métalliques rapportées -donc changeables- à la suppression pure et simple de ces indications sur les tableaux.

On y apprend que le département de l’Aisne est doté de poteaux indicateurs. 

La note de Dumas ayant pour objet l’harmonisation des couleurs (en fonction de la classification des routes) des couleurs, et cette note étant reprise tant par Cambacérès que sur le catalogue Bouilliant, il me paraît intéressant d’examiner ces préconisations. En effet, il est probable que ces couleurs ont été adoptées dans un certain nombre de départements, le premier étant celui de la Sarthe. 

Il faut dire que cette harmonisation des couleurs s’avérait nécessaire: 11 ans après la circulaire de 1835, les couleurs employés varient d’un département à l’autre, d’une voie à l’autre: « les Routes Royales avec fond bleu lettres blanches côtoient les fonds blancs lettres rouges,sur les Chemins de Grande Communication on y trouve du bleu, du rouge, du marron... » On peut parler de déréglementation !

Donc pour faire simple les préconisations de l’Agent Voyer en Chef de la Sarthe sont: du rouge pour les Routes Royales, du bleu pour les Départementales, du vert pour les Chemins de Grande Communication, du jaune pour les Petites Communications. 

Note Cambacérès 1846

 

DUMAS: teintes -1846 –

         

 

Jules Cambacérès

 

Né à Nîmes en 1798, il entre à l’école nationale des Ponts et Chaussée en 1817, à 19 ans. Son père était fabricant de burat* à Nîmes (Les Directeurs de Ministères en France au XIX et XXème siècle – Collectif 1976) puis Contrôleur de l’octroi à Nîmes. (@Essai de Généalogie – Alain Garric).

Il devient ingénieur des Pont et Chaussées à sa sortie.  

En 1824 et 1825, il dépose trois brevets dans un domaine sans aucun rapport avec son activité: l’«Emploi des acides stéarique,margarique et oléique à la fabrication de bougies, appelées bougies oxygénées> Il s’agit tout simplement d’un type de bougie à mèche creuse. (@La naissance de la lipochimie industrielle au cours du XIXème siècle –  Gérard Emptoz )

A la même époque il écrit une série d’articles :

– De l’Impôt pour les chemins vicinaux
– De la Corvée et de la prestation en nature
– Des Chemins d’intérêt commun
– Des Moyens de faire cesser dans Paris l’usage clandestin de la chair de cheval. (il était temps!)
– Mémoire sur l’application des acides gras à l’éclairage, présenté à l’Académie des sciences, le 17 janvier 1853.
.

* Le burat est une varièté d’étamine, une étoffe de laine légère.

 

 

1859: extension aux Chemins Vicinaux, Plaques de distances légales

En 1859, il reste deux années à la fonderie Bouilliant pour faire valoir son monopole légal sur les plaques en relief. En 1836 était créée la voirie vicinale qui permet de distinguer deux types de chemins vicinaux: ceux considérés comme non classés à la charge des communes, et les voies de Grande, Moyenne ou petites communications à la charge des départements et / ou des communes. Au 31 décembre 1859 il existe plus de 348 000 kms de chemins vicinaux ordinaires. En théorie, il n’y a pas de signalétique (poteaux) sur ces chemins. (annale des chemins vicinaux 1861)

Néanmoins la situation depuis la circulaire initiale de 1835  a évoluée, de manière disparate selon les départements, mais néanmoins significative. L’ensemble des routes Royales (devenues Nationales en 1848, qui deviendront Impériales en 1851) sont relativement équipées. Mais de plus en plus les Conseils Départementaux délibèrent en appelant de leurs vœux  une extension aux chemins vicinaux. 

C’est sans aucun doute l’une des raisons pour lesquelles, le 19 août 1859, le Ministre Secrétaire d’Etat au Département de l’Intérieur invite les départements, via les Préfets, à étendre la pose de tableaux et poteaux indicateurs aux Chemins Vicinaux. 

En outre, il se fait le porte-parole de Napoléon III, qui, de retour d’Italie, avait remarqué  que chaque localité possédait une inscription indiquant le nom de la localité et la distance séparant cette dernière des centres administratifs. (la guerre d’Italie avait effectivement eut lieu d’avril à juillet 1859).

Dés le mois d’août 1859, les Conseils Départementaux s’emparent de cette circulaire et font connaître leur volonté (nonobstant le fait qu’ils restent tributaires du financement) de la mettre en oeuvre: tel est le cas de la Charente-Inférieure, de la Corrèze, des Hautes-Alpes, de l’Aude, de la Somme, du Vaucluse, de la Haute-Saône (département qui précise qu’il y est d’autant plus favorable que déjà des poteaux indicateurs existent sur les Chemins de Grande Communication). Tous ces départements précisent que pour eux les routes départementales et Impériales sont déjà pourvues. 

Par contre, aucun  ne fait même allusion à une quelconque volonté d’installer des plaques de distance légales. Et effectivement, cette volonté Impériale ne fut suivie que par très peu de départements. Les seuls que l’on connaisse (parce que les plaques utilisées ont survécues) sont la Drôme et la Sarthe.  Faut-il y voir une affinité particulière des préfets de l’époque avec ce régime impérial renaissant ? C’est possible: Joseph Ferlay, préfet de la Drôme en 1849 à 1862, était Commandeur de l’Ordre Impérial de la Légion d’Honneur. 

Quoiqu’il en soit, même si cette demande ne correspondait à aucun besoin réel de la population, elle nous permet aujourd’hui de pouvoir admirer quelques plaques telles que celles de la Drôme, uniques en France. 

 

Une couverture nationale dans la diversité.

 A partir de 1861, le brevet S.G.D.G de la fonderie Bouilliant tombant dans le domaine public, les fonderies françaises se retrouvèrent en concurrence pour proposer des plaques et poteaux indicateurs. Cette ouverture contribua à la diversité de la signalétique sur le territoire national, tant dans le contenu que dans le choix des matériaux. D’une manière générale c’est la fonte qui prédomina pour les plaques, le fer et la fonte pour les poteaux.  

En 1866,  COL, un graveur de Clermont-Ferrand, dépose un brevet S.G.D.G concernant des « inscriptions sur zinc laminé montées sur fer galvanisé ». En 1870, il peaufine son invention en déposant un second brevet: « emploi du zinc blanc mât dans la fabrication des inscriptions ». La plaque en zinc laminé est née. De la même manière que les fonderies proposant des plaques en fonte, il déposera des dossiers dans les Conseils Généraux et emportera des marchés dans un nombre conséquent de départements.

Ci-dessous le lien qui vous mènera vers la page qui est consacrée à cette fonderie sur ce site (de nouveaux documents y seront bientôt ajoutés):

Il est difficile de recenser toutes les fonderies qui contribuèrent à consteller le territoire national de plaques et poteaux indicateurs en fonte. Certaines tirèrent leur épingle du jeu mieux que d’autres, mais, exception faite de la fonderie Varigney en Haut-Saône, force est de constater que leur domaine de chalandise se limitait pour beaucoup à un ou deux départements (généralement ceux de leur implantation et périphérie). Il était légitime pour les donneurs d’ordre, à savoir les Conseils Généraux, de privilégier les usines locales.

Voici quelques plaques ou poteaux issus de divers fonderies:

 

1914: la fin des plaques de cocher ?

Bien malin, sauf à dépouiller l’ensemble des comptes-rendus des délibérations de Conseils Généraux en France, de savoir quand les dernières plaques de cocher furent posées. En 1922 la Meurthe-et-Moselle commande des plaques...Alexandre Constantini fait savoir sur son site que dans son village en Drôme des plaques furent posées en 1931. En 1934 des poteaux indicateurs furent budgétisés dans le Calvados. 

Il est néanmoins clair que le nombre de plaques de cocher est en déclin et ceci pour plusieurs raisons:

  Dés sa création en 1890, le Touring Club de France finance des panneaux indicateurs directionnels en zinc émaillé avec lettres en relief. En 1908 : 8000 panneaux, en 1914 : 30000 ! Les conseils généraux auraient bien tort de ne pas s’inscrire dans cette démarche participative, ne serait-ce que pour des raisons budgétaires.

Voir l’article consacré au TCF sur ce site: 

 En 1908 apparaissent les panneaux Merci MICHELIN, en 1918 les Bornes d’Angles Michelin. La aussi, les Conseils Généraux se félicitent de ne plus avoir à financer la signalétique directionnelle.

En outre, il est clair que cette nouvelle signalisation correspond davantage aux modes de locomotion qui se développent, à savoir l’automobile terrestre à moteur !

La fin « officielle » des plaques de cocher (ou le début de leur histoire patrimoniale): l’article 58 de l’Instruction Générale sur la Circulation Routière du 1er août 1946 qualifie les plaques en fonte d’anciennes !

Certes on ne renouvellera pas les plaques, mais dans le même temps, on demande de les entretenir. « Elles donnent des renseignements intéressants« , eh bien on peut affirmer que 70 ans plus tard, c’est toujours la cas ! C’est d’ailleurs l’argument principal évoqué par les départements, aujourd’hui, qui font l’effort de maintenir en l’état les poteaux et les plaques de leur territoire. Ils ne sont certes pas encore assez nombreux mais l’intérêt que suscite ces « vestiges du passé », en ce début de XXIème siècle, par le biais d’internet et des initiatives privées, ne pourra que favoriser cette prise de conscience salutaire et nécessaire à la préservation de ce petit patrimoine.

 

9 Commentaires

  • Répondre Bernard Lagarde 13 mai 2020 at 15 h 45 min

    Bonjour, je viens de retrouver une plaque « de cocher » indiquant, à partir d’un carrefour du village tarnais Dourgne, plusieurs informations sur la distance entre ce point et d’autres villages exprimées en km et hm. Lettres blanches sur fond bleu. Il est aussi spécifié le mot TARN en haut puis en abrégé Chemin de grande Circulation n°12.
    La plaque est en fonte, un peu usée mais sympathique.
    Bien à vous et bravo pour votre article. BL

  • Répondre guillaume gallard 8 juin 2020 at 18 h 38 min

    bonjour
    je vis sur la commune de soreze dans le Tarn et j ai dans mon atelier une plaque de cocher en fonte de DURFORT, 4 direction, revel – soreze – cammazes – dourgne, en lettre noires sur fond beige en relief et dimension 30x60cm.
    je suis artiste-artisan en le village de Durfort, j y ai mon atelier et je realise des sculptures « mémoriales » a partie d élements divers ancien qu il s agit de mettre valeur.
    je vous dis cela car vous etes de Dourgne et que ce hasard est quand même intriguant.
    si vous possedez des vieilleries apparetenant à l histoire du village de dourgne pourquoi ne pas collaborer artistiquement.
    sinon oui tres bon article tres interessant, tres poetique aussi « plaque de cocher » ça nous ramene dans les songes du passé. merci

    • Répondre Patrick Rollet 9 juin 2020 at 10 h 31 min

      Bonjour, je pense que votre message est adressé à Bernard Lagarde qui réside effectivement à Dourgne. Je ne sais pas si il en prendra connaissance. Je lui transmettrai par mail.
      Sinon je suis intéressé par vos réalisations notamment si les sculptures « mémoriales » ont pour support une plaque de cocher. Mon adresse mail: plaquedecocher@gmail.com
      Cordialement
      Patrick Rollet

  • Répondre Laurent 8 août 2020 at 17 h 54 min

    Incroyable internet , je cherchais des poteaux en fonte et tombe sur votre site, très interessant et bien documenté.
    Bien cordialement
    Laurent

    • Répondre Patrick ROLLET 8 août 2020 at 17 h 58 min

      Merci, effectivement sur ce site on parle souvent de plaques et de poteaux en fonte. C’est même sa raison d’être. Bonne fin de journée.

  • Répondre La plaque de cocher rénovée - La Petite Gazette de Fos 8 mars 2021 at 18 h 23 min

    […] Si vous souhaitez en savoir plus sur l’histoire de telles plaques, vous pouvez, entre autres consulter le site plaquedecocher.fr. […]

  • Répondre PRESSICAUD 5 décembre 2021 at 15 h 07 min

    Bonjour
    C’est Gilles Ganault, de Paris, qui m’a contacté et informé de l’existence de votre site web dont je me félicite hautement. Ancien consultant en « mobilité douce », j’ai en effet sorti un nouvel ouvrage sur le vélo dans la mobilité en début d’année : Le vélo au quotidien, éditions Libre et Solidaire, dans lequel je glisse quelques idées, dont celle de ne pas laisser dépérir naturellement ce petit patrimoine des plaques de cocher bien utiles encore aux cyclistes randonneurs. Je rêvais donc qu’il y ait une site comme le vôtre d’inventaire et de ressources sur le sujet. Sujet à la fois modeste pour son objet mais ouvrant un chantier immense si l’on veut inventorier, sauvegarder et revalorisation ce petit patrimoine. N’hésitez pas à me contacter en retour. Bien cordialement.

  • Répondre HAUSWALD jean-paul 22 novembre 2022 at 19 h 57 min

    bonsoir
    super site ,merci
    .pour les plaques route impérial 59depuis 1824 (qui remplace la 75 )qui n’ont pas d initial de fabrication d ou peuvent t elle provenir une trop rouillée l autre bleu clair fond plus lettres
    cordialement

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